Le triclosan (TCS), le triclocarban (TCC) et les parabènes (esters de l'acide para-hydroxbenzoïque) sont employés en tant qu'antiseptiques et agents conservateurs dans les produits de soins corporels. Leur usage génère des inquiétudes sur leur devenir et leur effet potentiel sur la faune et la flore (Bazin et al., 2010). En effet, ils sont introduits dans le milieu récepteur principalement via les effluents des stations d'épuration et les rejets urbains de temps de pluie (McAvoy et al., 2002; Agüera et al., 2003). Les principaux objectifs de ces travaux étaient de mettre en place une base de données sur les niveaux d'imprégnation dans les eaux résiduaires urbaines de deux agglomérations, Paris et Beyrouth par temps sec, et d'évaluer l'efficacité des traitements présents dans différentes stations d'épuration : deux à Paris une à Beyrouth. Le suivi de la contamination des émissaires pour les agglomérations de Paris et Beyrouth a permis plusieurs avancées sur les connaissances relatives à la fois à l'analyse des parabènes, triclosan et triclocarban mais aussi à la contamination des eaux résiduaires urbaines dans les deux pays par ces molécules. Ainsi sur les aspects analytiques, une très grande stabilité des parabènes, triclosan et triclocarban, une fois fixés sur cartouche Oasis® HLB, après extraction sur des échantillons d'eaux usées préalablement acidifiés, a été mise en évidence. Un test de conservation, mené sur une période de 4 mois, a montré la possibilité de conduire des analyses des parabènes, triclosan et triclocarban dans des pays ne possédant pas la chaîne analytique complète (absence d'un appareil de type UPLC/MSMS, par exemple), ce qui ouvre des perspectives intéressantes pour des pays émergents. Pour les niveaux de contamination rencontrés, nos résultats montrent que les méthylparabène, éthylparabène et propylparabène présentent les concentrations les plus élevées alors que le benzylparabène n'a jamais été observé dans aucun échantillon.
Les parabènes sont présents en phase dissoute à plus de 99 %. Les log(Kd) estimés pour ces composés sont compris entre 0,8 et 2 (en valeur médiane) pour la France et 1,3 et 2,3 pour le Liban. Les MES ne sont donc pas le principal vecteur de ces composés dans les émissaires. Le triclosan est lui majoritairement présent en phase particulaire, il offre des log(Kd) plus élevés que ceux des parabènes, voisins de 4 pour les deux pays. Le triclocarban est plus singulier. Dans les émissaires de l'agglomération parisienne, son log(Kd) est plus faible que celui du triclosan (3,4 contre 4) alors que c'est une situation inverse qui est obtenue Beyrouth : 4,6 pour le triclocarban et 4,1 pour le triclosan, conséquence directe de la plus forte contribution de la phase particulaire à la charge totale en triclocarban au Liban. Sur la base des concentrations mesurées, pour la première fois en France, des flux annuels par équivalent habitant ont pu être déterminés pour l'ensemble des composés ; ils sont de 1158 mg/EH/an pour MeP, 276 mg/EH/an pour EtP, 253 mg/EH/an pour PrP, 12 mg/EH/an pour IsoBuP, de 66 mg/EH/an pour BuP, 268 mg/EH/an pour TCS et 9 mg/EH/an pour TCC. Ces estimations n'ont pu être réalisées pour le Liban car les mesures de débits n'étaient pas possibles sur les sites suivis. Bien que les phénomènes mis en jeu diffèrent suivant les composés, il a été montré que les deux stations d'épuration de Seine Centre et Seine Amont éliminent à plus de 97 % les parabènes, le triclosan et le triclocarban.