Suivi des contaminants organiques présents dans les eaux usées brutes de l'agglomération parisienne par analyse ciblée et non-ciblée : de la mesure des concentrations à l'exposition environnementale

BERNIER-TURPIN Gauthier 2025

L’épidémiologie basée sur les eaux usées (WBE, Wastewater-Based Epidemiology) repose sur l’hypothèse d’un lien quantitatif entre les concentrations de contaminants (considérés comme des traceurs) mesurées dans les matières excrétées et les usages réalisés par la population raccordée au réseau d’assainissement. Cette approche permet d’évaluer les aspects quantitatifs et temporels sur une large gamme de traceurs, offrant ainsi un outil pour caractériser les dynamiques de consommation à l’échelle de la ville. L’objectif principal de ce travail était de développer un observatoire des pratiques de consommation à l’échelle de l’agglomération parisienne à partir d’eaux usées collectées sur la station d’épuration de Seine-Centre, jugée représentative des effluents parisiens. Cet objectif a nécessité la mise en place d’un protocole analytique robuste, élaboré en combinant extraction en phase solide (SPE) et analyse LC-MS/MS, et optimisé pour être compatible avec des investigations complémentaires en spectrométrie de masse haute résolution (HRMS). Les échantillons d’eau usée, collectés sur deux ans à une fréquence bi-hebdomadaire, ont permis l’étude des variations hebdomadaires et saisonnières des usages. D’autres développements ont été menés afin d’améliorer l’interprétation des résultats.

La prise en compte d’une population dynamique, estimée à partir de paramètres hydrochimiques, a notamment permis une meilleure représentation des fluctuations réelles de la population contributive sur la zone de collecte (mobilité pendulaire, congés, etc.) y compris lors d’épisodes pluvieux. Ce travail a permis de mettre en évidence la contribution parfois significative de la fraction particulaire aux flux mesurés, soulignant la nécessité d’intégrer la phase solide dans l’estimation des usages rapportés. Nos résultats ont révélé une diversité de dynamiques, ces dernières étant inhérentes à la nature des composés. La majorité des substances à usage récréatif présentent des hausses marquées durant le week-end et les périodes festives. Toutefois certaines, comme le cannabis, par ailleurs grandement majoritaire vis-à-vis des autres usages du même type, s’inscrivent dans un schéma de consommation quotidien.

Les dynamiques observées sur les produits pharmaceutiques reflètent plutôt des tendances liées à la nature de la pathologie (maladies chroniques ou médication ponctuelle) et au mode de délivrance, avec notamment une mise en évidence de l’automédication pour certaines spécialités en vente libre. L’analyse HRMS a permis d’élargir le spectre de nos observations, en identifiant à la fois des  rejets directs de certains composés pharmaceutiques, ainsi que des marqueurs émergents, tels que le répulsif anti-moustique DEET, dont la présence suit une dynamique estivale marquée. Enfin, la mise en relation de la consommation d’antihistaminiques avec les périodes de pollinisation a permis d’explorer le lien entre exposition environnementale et réponse thérapeutique. En effet, une variabilité saisonnière marquée a été observée, principalement corrélée à la pollinisation des graminées, alors que la présence d’un niveau de base tout au long de l’année témoigne de la prévalence des rhinites allergiques pérennes (acariens, animaux domestiques).

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